mardi 30 juin 2015

Kilomètre vertical du mont Albert – 26 juin 2015



Le matin  du 26 juin, je suis partie de Rimouski pour me rendre au parc national de la Gaspésie, où une première épreuve m'attendait dans le cadre de l'Ultra Trail du mont Albert. Il s'agissait du kilomètre vertical, une course de 5,6 kilomètres avec un dénivelé de 1 000 mètres. La course se terminait au sommet du mont Albert. J'étais contente de faire cette course, car le sentier emprunté correspondait aux 5 derniers kilomètres de ma course du lendemain... ça me permettait de faire un tour de reconnaissance.

Avant de partir de Rimouski, j'ai ouvert au hasard mon livre de Bruce Lee, et je suis tombée sur cette citation : « Are you going to make your obstacles stepping stones to your dreams, or stumbling blocks because unknowingly you let negativess, worries, fear, etc. get over you? ».

La citation a pris tout son sens quand j'ai mis les pieds dans le sentier « vertical ». J'ai passé 1 h 20 à me répéter « stepping stone, stepping stone, stepping stone... ». Il n'y avait rien d'autre dans mon esprit, si ce n'est la respiration de la fille derrière moi, qui m'a dit, une fois au sommet : « Toi je t'ai suivie tout le long!!!! je voulais pas te laisser partir! ». Les 100 derniers mètres de l'ascension se faisaient dans la neige, et on se faisait accueillir au sommet au son du clairon. 
Une fois au sommet, j'ai vite eu froid, il faisait environ 5 degrés. Je me suis couverte, j'ai pris quelques photos, et je suis redescendue doucement en grignotant. La descente m'a pris presque 2 heures. Je ne voulais absolument pas me blesser, les roches étaient mouillées et glissantes, et j'avais 22 km à faire le lendemain. 

Je suis arrivée sur le site juste à temps pour la réunion d'information pour les courses du lendemain. On nous a confirmé qu'on avait vu des traces d'ours par dessus les traces des coureurs qui venaient de faire le kilomètre vertical. Glurp. Super rassurant. La réunion s'éternisait, le jour tombait, et mon campement n'était toujours pas monté.

Pas de stress.

Ce soir-là, j'ai monté ma tente en catastrophe avant le coucher du soleil, allumé un feu qui faisait juste de la boucane, mangé du Kraft Dinner à la frontale, eu la frousse de ma vie quand un orignal et son petit ont visité le sous-bois de mon terrain de camping, suis allée me brosser les dents en auto... me suis enfermée dans ma tente, me suis massé les jambes comme si y'avait pas de lendemain... pour finir par mal dormir jusqu'au matin... et me réveiller avec mes règles. 

Pas de stress.

Je me pointe sur la ligne de départ du Skyrace une minute avant le départ, pas réchauffée, mal nourrie, mais munie d'une clochette à ours et couverte de chasse-moustiques. À frette!



samedi 20 juin 2015

Mon cœur d'enfant



Dans une semaine, je vais participer à l’Ultra Trail du mont Albert, dans le parc national de la Gaspésie. Je m’attaquerai au Skyrace, une boucle de 23 km avec un dénivelé positif et négatif de 1 500 m. Je me sens prête mentalement et physiquement. En fait, même s’il s’agit de ma plus longue course à vie, de ma première expérience en semi-autonomie et de mon plus important dénivelé à vie, je ne me suis jamais sentie aussi prête pour une course… et ce n’est pas parce que je sous-estime la montagne.

C’est une leçon que j’ai apprise lors de ma toute première course en sentier. La montagne est plus forte que toi. Il faut l’aborder avec humilité et se plier à ses exigences. Ralentir quand c’est difficile, accélérer quand c’est possible… respecter le terrain. 

Je me sens prête, d'abord parce que je me suis entraînée fort en vue de cette épreuve. Très fort. Ensuite, parce que je me sens de plus en plus à ma place dans les sentiers. Je sais que les deux premiers kilomètres seront l’enfer. Mes jambes vont brûler, je serai essoufflée et je me dirai « Mais qu'est-ce que je fais ici? ». Ça va durer entre 15 et 30 minutes, je m’y attends. Après, le terrain ne sera pas nécessairement plus facile (au contraire), mais je sais qu’au bout d’un moment, dans les sentiers, j’entre dans ma « zone ». Le degré de concentration exigé est si élevé qu’il n’y a comme plus rien autour de moi. Comme si ma vision périphérique rétrécissait. Le regard au sol à quelques pieds devant moi pour éviter tout faux pas, le bruit de ma respiration, le bruissement de mes pas, il n’existe plus rien d’autre. Ça monte, ça descend, ça change le mal de place, et quand ça monte longtemps… j’essaie de maintenir une vitesse constante.

Je me sens prête aussi parce que je connais la Gaspésie. J’y ai passé tous mes étés d’enfance et j’y ai habité. J’ai de la famille qui y vit. J’ai de la famille qui y est enterrée. Je connais le climat, les écarts de température, le vent, le froid. Je sais que la brume sur la mer le matin annonce le beau temps, et que la brume dans les montagnes annonce une journée de pluie sans répit. Je connais les plages rocailleuses, brutes où gisent les carcasses de crabe et les goémons, je connais l'air salin, l'horizon à perte de vue…

Lors d’un voyage en Gaspésie, il y a quelques années, mon mari m’a dit : « Mais t’es donc ben belle, quand t’es ici ». Pour moi l’explication était évidente : « C’est parce que c’est ici qu’est mon cœur d’enfant ».

La Gaspésie n’est pas que plages, elle est aussi montagnes. Quand j'étais petite, je regardais les montagnes pleines de neige même en été, au loin. Ma mère m'avait dit que c'étaient les Chic-Chocs. Je les observais et il me venait des images de gomme à la menthe fraîche.

La semaine prochaine, avec mon cœur d’enfant, je vais gravir l’une des plus hautes montagnes des Chic-Chocs. Si tout se déroule comme je le souhaite, vers 10 h 12, samedi le 27 juin, j’aurai les pieds dans la neige, la tête dans les nuages, une odeur de menthe fraîche, et le cœur rempli de ciel Bleu.








samedi 6 juin 2015

At full speed

I am going to fire up and live this thing as large as I can live it until I can't live it that large anymore.
Diana Nyad
 
« J’aime tout, je veux être bonne dans toute! ». Voilà une phrase qui a semblé au départ déconcerter mon entraîneur quand il m’a demandé « Qu’est-ce que je peux faire pour toi? »
J’aime (presque) tout. Ça se reflète aussi dans ma vie professionnelle. Je me suis déjà réorientée une fois, et je songe à le faire une deuxième fois… Une période de remise en question peut être vécue de façon stressante… ou pas, ça dépend de la façon dont on l’aborde… Mon mari me faisait remarquer l’autre jour que le mot « carrière », en anglais, est aussi un verbe : to career.
Carreer : verb (used without object)
to run or move rapidly along; go at full speed.
 
***
 
Une amie me demandait l’autre jour si je trouvais difficile de mener de front course à pied, arts martiaux, nage, vélo, haltérophilie et musculation.
 
Non! Au contraire! Comme les pièces d’un casse tête, il suffit d’en enlever une pour réaliser qu’il manque une partie de l’image!
 
La nage aide mon cardio pour la course, le vélo m’aide à être plus forte pour monter des côtes, le kung fu améliore ma souplesse pour l’haltérophilie (oui oui! l’haltérophilie demande énormément de souplesse), l’haltérophilie développe ma puissance en course à pied… et tout s’emboîte.
 
J’ai délaissé le kung fu pendant un mois. C’est au retour que j’ai constaté à quel point j’avais perdu de ma souplesse.
 
Je ne sais pas si le fait de varier autant m’empêche de vraiment progresser dans un sport en particulier. Je ne pense pas en fait. Comme dans une histoire bien écrite, j’ai l’impression que si je retirais un élément, tout s’effondrerait.
 
Et puis la variété me permet d’absorber un gros volume d’activité physique. Comme je fais rarement la même chose deux jours de suite, mon corps récupère activement.
 
La nage me fait récupérer de la course, la course fait passer mes courbatures d’haltérophilie, le kung fu… ben lui il englobe tout. C’est la pièce maîtresse de mon casse-tête.
 
J'ai décidé d’embrasser la variété, et de cesser de la voir comme un « problème ».
 
On n’a qu’une vie à vivre.
 
Je career. Full pin.