Au milieu de l'hiver, j'ai découvert en moi un invincible été.
Albert Camus
Janvier 2015. Samedi matin. Je m’entraîne pour un
demi-marathon d’hiver. C’est mon deuxième demi-marathon. Mon programme d’entraînement
dit « 16 km ». Ouf. Y’en aura pas de facile. On gèle dehors… 16 km, c’est
long (pour une fille qui n’a pas couru cette distance souvent, tout est relatif,
bien sûr).
Mais là : est-ce qu’il fait trop froid? Mes jambes
vont-elles tenir le coup? Vais-je me transformer en statue de glace au 14e
kilomètre? Est-ce que j’apporte de l’eau? Mais mon eau va geler? Mon eau
va-t-elle geler? Vais-je avoir mal au ventre comme ça m’arrive souvent? Et si,
et si, et si???
Une petite communication express avec mon coach de course me
rassure : je pars sans eau. C’est l’hiver, on ne sue pas comme en été. Ben
oui. C’est bien vrai. Pas de panique, Papage. Mets ta cagoule. Pars!
Mais là! Je vais avoir besoin d’un gel, et si je prends un
gel, je dois le prendre avec de l’eau, sinon, sinon, sinon… la Terre va s’autodétruire!
Wôôôô! Take it easy, Reggae Mama. Enfile tes gants pis SORS!
Dehors c’est le gros soleil. Une journée d’hiver magnifique.
Je monte sur la montagne, je suis bien. Wow! Je pourrais courir looooonnngtemps
comme ça...
Puis évidemment, à force de monter, je me fatigue. Ben oui,
je suis fatiguée. PIS? Je vais pas mourir parce que mes jambes sont fatiguées,
hein?
J’ouvre mon gel. J’ai pas d’eau. PIS? Je vais pas mourir
parce que c’est sucré pis que j’ai soif! Je vais le siroter lentement, tiens.
Bon, j’ai mal au ventre. Ce satané mal de ventre qui revient
souvent quand je cours longtemps… ben oui, j’ai mal au ventre, mais c’est pas
grave… je me dis que l’énergie circule dans mon corps et c’est tout. Ça passe.
Merde! J’ai mal au genou!!! Mah oui, je suis fatiguée. Mon
genou est fatigué, normal. Je ne suis pas blessée pour autant. Demain ça ira
mieux.
Et tout à coup, la phrase magique se présente à mon esprit.
JE NE SUIS PAS UN ROBOT!
Je ne suis pas une horloge! Je n’ai pas besoin de boire tant
de millilitres d’eau à telles intervalles pour survivre à un 16 km! Je peux
très bien courir cette distance sans ravitaillement, même. Tout devient moins
dramatique… et je trouve un nouveau plaisir à courir.
Ces jours-ci, je dis beaucoup que je cours « freestyle »,
et mes amis me demandent ce que je veux dire… ben c’est ça : je suis mon
plan d’entraînement, mais je ne fais pas une syncope si je saute une séance ou
un jour de repos. Je me laisse de la liberté dans tout ça… et j’angoisse
beaucoup moins à propos du ravitaillement.
Ce sera une toute autre histoire dans les grosses chaleurs
de l’été, mais pour le moment, c’est le printemps, la température est idéale,
je ne suis pas un robot, et je cours FREESTYLE!!!